Le conflit armé en
Casamance a été au menu du carrefour d’actualité
au Cesti ce mercredi sur le
thème « Conflits fonciers et la crise politique : aux origines d’un
conflit armé ». L’étincelle de la spoliation foncière, allumée par l’Etat du
Sénégal, la négation culturelle et la répression brutale pour étouffer la
« fronde », ont été à la base de l’éclatement du conflit armé.
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| Casamance |
Par Mamadou Lamine BA
« L’Etat du Sénégal, au nom de la loi sur le domaine
national, a confisqué des terres des autochtones par les fonctionnaires, les
maires, les administrateurs et les a affectés à des personnes étrangères de la
région. Ça a été une tournure
particulière, notamment dans les zones littérales (Cap Skirring) et les
périphéries de Ziguinchor où la
situation s’est empirée », a expliqué
Jean-Claude Marut.
« Les populations qui avaient l’habitude de gérer leurs
terres, se sont mobilisées contre les pertes de leurs vergers, plantations et
des palmeraies. Elles ont été choqué par la confiscation qui s’est faite sans
concertation ni indemnisation des terres, donnés à des étrangers, au plus
offrant, sur la base du clientélisme politique, de la corruption », a
révélé le chercheur.
« La perception péjorative de la tradition en Casamance,
considérée comme archaïste par l’Etat du Sénégal, sa négation et la répression brutale pour étouffer touts fronde
interne qui sont à l’origine du conflit
armé en terre casamançaise », a, en substance justifié le conférencier et chercheur au Centre
National de Recherche Scientifique (Cnrs), à Paris.
Tout le monde, selon le conférencier, Chrétiens comme Musulmans,
surtout, se sont opposés à la pratique. L’Etat a réprimé les protestataires.
« Ce traitement brutal a été très mal vécu. Ça a renforcé ce sentiment de
spoliation encouragé par l’administration. La répression a exacerbé les populations locales qui se sont senties
violées et menacées.
C’est la brutalité a mené à la mobilisation, par des
pétitions, marches, puis à l’étape suivante : la violence par des destructions
et incendies de bâtiments… Les départs vers Dakar se ralentissent et les jeunes
reviennent au moment où de nombreux nordistes s’y rendent aussi pour des
perspectives d’enrichissement avec l’encouragement de l’Etat », fait
savoir Jean-Claude Marut.
Le Sénégal a voulu
arracher la Casamance aux Casamançais
Pour l’Etat, le commerce, la mer, la terre vont
rapporter des recettes fiscales, ce qui va accroître la tension. « Nous
étions devenus des étrangers à la Casamance avec le soutien des autorités
locales. Toutes nos plantations les revenaient. Ce qui n’est pas possible si
nous nous rendons chez eux. Le Sénégal a voulu arracher la Casamance aux
Casamançais ».
La réponse de l’Etat a été trop brutale face à la marche
pacifique par des violences et des arrestations préventives en Casamance et à
Dakar où des gens étaient soupçonnés. Les gendarmes ont tiré dans la foule sans
armes à Ziguinchor. La liberté d’expression mise en cause. Les rescapés de
cette violence vont se reconstituer dans les périphéries de la ville et vont
mener les premiers combats.
De nouveaux risques
existent
Aujourd’hui, ce qui s’était passé à Ziguinchor se répètent
dans d’autres villes comme Bignona, Oussouye. Il y a le retour des déplacés qui
avaient quitté à cause du conflit dans une centaine de village. Soixante mille
(60.000) personnes qui vivaient le long de frontière de la Guinée Bissau. Mais,
Les autorités sont plus prudentes en avançant avec beaucoup de précautions.
L’autre risque vient du fait que les gens qui vivaient dans
un village comme Niassya, ont abandonné leurs terres pour se refugier à
Ziguinchor. Les Bissau-guinéens sont venus, à leur tour, pour des raisons
sécuritaires, s’installer dans ces villages et exploitent leurs terres. Le
retour des déplacés, qui réclament leurs terres, est donc une autre source de
conflit en gestation.
Dans la région de Ziguinchor, notamment dans le Cassa et le
nord de Bignona, il existe des gisements de zircon. « L’Etat a cédé les
droits d prospection à des canadiens. Si cette exploitation voit jour, c’est toute
la zone côtière qui sera bouleversée dans le domaine environnemental. Déjà, des
groupes de rebelles agitent la question et s’y opposent.
La déforestation en cours en Casamance : en basse Casamance,
le tapis verdoyé est en voie de disparition.
Pour acheter la paix, l’Etat a laissé des ex rebelles exploiter la forêt de
manière abusive même si « ça fait vivre les jeunes (dans les scieries) qui
n’ont pas d’emplois », car « Il n y a pas de débouché pour les jeunes
de la Casamance », déplore M. Marut.
Pour lui, le conflit foncier, le choix politiques qui ont
amené vers celui armé n’est pas éteint avec la non prise en compte de la
dimension politique de la tradition en Casamance. « L’Etat a voulu
instrumentaliser la capacité de la tradition locale pour l’appliquer à la
résolution du conflit. Pour un conflit nationaliste, c’est une fausse
route ».

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